ENQUETE SUR LA PRATIQUE DU MARIAGE FORCE/PRECOCE DANS la région du sud-ouest/gaoua
Le mariage est un fait de société relevant d’une pratique ancestrale. En plus du fait qu’il scelle des liens entre deux individus, dans la conception du droit moderne, il apparaît comme un contrat civil, solennel par lequel l’homme et la femme s’unissent en vue de vivre en commun, de se prêter mutuellement secours et assistance. Dans la société traditionnelle, le mariage est conçu comme une union entre deux familles si bien qu’il est moins l’affaire d’un couple que l’alliance de deux lignages, de deux familles, de deux villages dont l’intérêt du groupe prime sur l’intérêt individuel. Face au modernisme, il se pose alors un problème de l’application effective du Code des Personnes et de la Famille(CPF) dans le contexte Burkinabé, réglementant le mariage à l’opposé de certaines coutumes, traditions et mentalités. Le mariage est le socle de la cellule familiale et comporte alors des garde-fous et est réglementé par le droit civil, la religion et la tradition/coutume.
La conception du mariage dans les communautés vivant au Sud-Ouest est particulière, dû au fait que le type de fonctionnement de cette société est basée sur les relations de lignage matriclan qui fait du mariage un outil de pérennisation de la cellule familiale et d’accomplissement du devoir de la paternité. Dans ce processus de mariage, l’avis de la femme importe peu. Elle joue un rôle de domestique ou d’aide familiale et à tout subir, ou alors elle est l’objet d’un don dans les relations matrimoniales.
La présente enquête relative à la pratique du mariage forcé/précoce dans la région du sud-ouest organisée par l’Association pour la Promotion Féminine de Gaoua (APFG)avec le soutien et l’appui financier du partenaire ‘’Global Fund for Women’’’’, a pour but d’appréhender les principales causes liées à l’existence et à la résistance de cette pratique et de contribuer à l’abandon total de ce fléau dans la région du sud-ouest.
En rappel, l’APFG a mené une enquête sur la promotion à l’abandon des mutilations génitales féminines.
Les raisons objectives de cette enquête s’inscrivent dans le processus d’exécution du programme d’activités de l’APFG à travers son combat quotidien et inlassable contre les violences faites aux femmes et la lutte contre l’analphabétisme, la pauvreté, les pratiques néfastes telles le lévirat, l’excision,…..qui enfreignent l’épanouissement et la liberté des femmes en général et celles du Sud-Ouest en particulier.
Cette enquête a pour objectifs spécifiques de :
- Identifier les causes et les fondements liés à l’existence et à la persistance de la pratique du mariage forcé/précoce dans la région du Sud- Ouest ;
- Mettre en place des mécanismes appropriés de lutte et de conscientisation des populations surtout celles rurales;
- Mettre à la disposition des autorités et des acteurs de développement des données fiables sur le mariage forcé et /précoce dans la région du sud-ouest.
- Faire des propositions et des recommandations de lutte contre la pratique.
Afin d’atteindre les objectifs visés, une des méthodes utilisée est l’approche participative. Il s’agit des entretiens directs individuels et des focus groupes selon les tranches d’âge et le genre. L’approche a porté sur un échantillon de quarante (40) personnes par village à raison de deux (02) villages par commune. Elle a privilégié les entretiens à partir d’un giude avec les leaders communautaires des villages, quelques femmes victimes de la pratique et a pris en compte toutes les couches socioprofessionnelles à travers la collecte de données pour recueillir les raisons probables de l’existence de pratique et les stratégies appropriées de lutte dans les communes de la région.
L’interprétation et l’analyse des données de l’enquête, révèlent que la persistance de ce fléau est due au fait que cette pratique existe par ignorance des acteurs et l’insuffisance des sensibilisations. A cela s’ajoute l’analphabétisme des populations, le poids de la tradition, la pauvreté des ménages et le manque d’ouverture d’esprit des victimes, et la faible implication de l’Etat dans la lutte.
Avec l’évolution des mentalités et les efforts de scolarisation des enfants, malgré les sensibilisations, la pratique persiste encore dans certaines localités surtout rurales mais de manières clandestines favorisées par la proximité des pays frontaliers de la Côte d’ Ivoire et du Ghana.
Les raisons principales de la persistance de la pratique sont multiformes et tiennent essentiellement sur deux raisons fondamentales à savoir :
- Le poids de la tradition et des coutumes ;
- La pauvreté, l’ignorance et l’analphabétisme des populations.
Les conséquences néfastes de cette pratique sont connues de la majorité des enquêtés qui à travers leurs suggestions prônent pour l’usage des méthodes centrées sur une large sensibilisation des populations, la promotion et la vulgarisation du code des personnes et de la famille (CPF) du Burkina.
Quant à l’appréciation des stratégies actuelles de lutte contre la pratique, la majorité des enquêtés estime qu’elles sont inefficaces voire inexistantes et qu’il faille les renforcer par la mise en place de comités national et locaux de veille de lutte contre la pratique.
Des recommandations faites préconisent de nouvelles stratégies pour mieux agir sur le mental des populations, sur leurs habitudes car le fossé entre les textes juridiques et la pratique est grand.
A cela s’ajoute l’interpellation de l’Etat à s’impliquer davantage et de façon plus concrète et efficiente dans la lutte contre la pratique des mariages forcés ou précoces par :
-l’organisation des campagnes de Sensibilisation et de formation des leaders d’opinion, des responsables coutumiers et de la société civile sur les effets néfastes du mariage précoce et forcé, par des conférences débats, colloques, ateliers de manière déconcentrée.
– La création d’un comité national et local de lutte contre le mariage précoce et forcé en vue d’obtenir une coalition des associations et ONG œuvrant dans le même sens car c’est ensemble qu’il faut lutter contre ce fléau. Pour ce faire, une collaboration plus étroite entre ces acteurs et les autorités compétentes s’avère indispensable.
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